La carrière vidéo de ce classique Disney est pour le moins extravagante. Tout d'abord il faut savoir que Le Crapaud et le Maître d'école n'est jamais sorti au cinéma sous sa forme originale. Composé arbitrairement de deux histoires différentes par la suite (cf. encadré Scénario), son exploitation hexagonale en VHS n'a jamais été faite dans cette intégralité respectée. Seul le segment du Vent dans les Saules, rebaptisé la Mare aux Grenouilles (sic) fut disponible à la vente dans la collection Mini Classics (aujourd'hui retirée de la vente). Toutefois Outre-Atlantique l'intégralité du film est sortie en VHS et sur support Laserdisc il y a quelques années. Outre-Manche c'est le segment avec Ichabod Crane qui est sorti seul en VHS, accompagné d'un court-métrage, puis ce sont nos voisins belges qui l'accueillent sur support DVD dans la collection Contes et Légendes de Walt Disney (test ici), en mai 2003 ! Tout rentre enfin dans l'ordre le 3 octobre 2000 aux USA avec le DVD (incluant une version francaise), et ce 7 octobre 2003 en France, avec la présente édition. Les deux histoires sont donc enfin réunies pour la première fois, depuis 1949, en vidéo, dans le film au format d'origine...

Sorti après Coquin de Printemps, Les Trois Caballeros et Mélodie Cocktail, Le Crapaud et le Maître d'école est le dernier film "package" officiel de Disney (si l'on exclut Les aventures de Winnie l'Ourson de 1977). Et tout comme ses prédécesseurs, les moyens métrages présents dans ce classique du studio sont vraiment typiques de la période d'après-guerre, où tous les studios sortaient d'un contexte très difficile et connaissaient de graves difficultés économiques.

Reprenant fidèlement la superbe histoire et envoûtante histoire du Vent dans les Saules (classique de la littérature britannique), ce moyen métrage est bien réalisé mais manque relativement de 'pêche'. La psychologie des différents personnages n'est par exemple pas assez approfondie, alors qu'à l'origine Blaireau est vraiment attachant et Crapaud encore plus fou dans ses passions irréfrénées. Cependant cette version disneyenne n'est pas dénuée de charme : l'humour est omniprésent, les moments d'action intéressants... seule la mise en scène reste "plan-plan". En ressort une production sympathique, qui assure de passer un moment agréable... et ce n'est déjà pas rien.

Vient ensuite le moyen métrage de La Légende du Cavalier sans tête. Original, ce segment est à la fois typiquement disneyen sans l'être, ce qui le rend terriblement attachant. Après un début enchanteur et une chanson guillerette, le récit plonge dans le conflit passionnel entre deux concurrents improbables prêts à tout pour conquérir la peu farouche Katrina Van Tassel, pour finir dans une impasse scénaristique qui laisse plus que jamais un flou sur ce qu'il advient de l'échalas Ichabod Crane.
Une morale qui en déroutera plus d'un, qui vient conclure une scène de frayeur anthologique, cette course-poursuite insensée entre Ichabod et le cavalier sans tête, au suspense incroyable. En outre les protagonistes de cette production sont moins 'lisses' que le héros disneyen-lambda : Ichabod est cupide, Brom vraiment simplet et opportuniste, quant à Katrina, sa superficialité et son machiavélisme hypocrite en désarçonnera là aussi plus d'un. Ces traits de caractère les rendent d'autant plus humains, donnant ainsi une épaisseur et une vraie dimension à un récit par ailleurs effrayant, voire gothique. Pas étonnant que ce segment fut ainsi la première inspiration avouée de Tim Burton pour son film Sleepy Hollow (qui fut une belle réussite lors de sa sortie en salles).
Au final, ce package Disney reste d'une belle modernité plus de cinquante ans après sa sortie en salles. Le rythme est un peu daté en comparaison des productions d'aujourd'hui, mais l'efficacité des scénarios compense de fort belle manière.

Film récompensé du Golden Globe® de la meilleure réalisation.